Mali 2020

Le Mali s’est déjà soumis à trois exercices PEFA qui ont eu lieu respectivement en 2006, en 2010 et en 2016. En 2018, l’évaluation de 2016 qui avait été faite avec le cadre PEFA de 2011 et avait porté sur les exercices 2013, 2014 et 2015, a été refaite avec le nouveau cadre PEFA de 2016. En 2019, le gouvernement du Mali a choisi de procéder à une nouvelle évaluation pour mesurer l’évolution de la performance du système de gestion des finances publiques sur la base de la nouvelle méthodologie PEFA. L’analyse porte, de façon générale, sur les exercices 2016, 2017 et 2018, mais intègre, pour certains indicateurs des données pour l’année 2019 et concerne toute l’administration publique centrale (à l’exclusion donc des entreprises publiques et des collectivités décentralisées, mais y compris les services déconcentrés).

Cette nouvelle évaluation PEFA doit également faire ressortir les perspectives pour une gestion plus performante des finances publiques.

Les résultats de l’évaluation PEFA 2019 devraient servir de base au Gouvernement pour le suivi et la mise en oeuvre des réformes dans le domaine des finances publiques et pourront être utilisés par les Partenaires Techniques et Financiers (PTF) dans le dialogue avec le Gouvernement sur les aspects liés aux finances publiques. Cette nouvelle évaluation devrait également permettre d'actualiser le Plan de Réforme de la gestion des finances publiques au Mali (PREM) 2017-2021.

Principales conclusions et incidence sur la discipline budgétaire, l’allocation stratégique des ressources et la fourniture des services publics

Le système de gestion des finances publiques au Mali sur la période couverte par l’évaluation évolue principalement pour mettre en place le nouveau système fondé sur les 6 directives de l’Union économique et monétaire de l’Ouest africain (UEMOA) de 2009.

Le PEFA permet d’analyser le système de gestion des finances publiques selon trois axes transversaux:

  • Le maintien de la discipline budgétaire ;
  • La capacité de définir des stratégies budgétaires publiques ;
  • La fourniture des services publics.

L’analyse fait apparaître les principales conclusions suivantes :

Le dispositif institutionnel existe semble robuste et la volonté politique sont présents, mais il n’est pas encore appuyé par des outils informatiques suffisamment performants pour assurer une bonne discipline budgétaire globale, d’autant que le système de vérification interne et externe (notamment la Section des Comptes de la Cour Suprême et le Parlement) présente des faiblesses. La crédibilité budgétaire reste donc basique.

La mise en place d’outils de programmation macroéconomique et budgétaire pluriannuels a permis d’améliorer l’allocation stratégique des ressources globales, mais les instruments techniques ((cadre de dépenses à moyen terme et budget de programmes)ne donnent ne sont pas encore très bien coordonnés, malgré leur déploiement dans tous les ministères.

Le pilotage des services publics pâtit encore de la relative faiblesse de la gestion stratégique sectorielle et de l’insuffisance d’instruments propres (notamment des outils de la gestion axée sur les résultats) de la supervision relativement faible des entreprises publiques et des établissements publics et d’un système.

d’information, de contrôle et d’évaluation des services fournis par l’administration centrale qui reste peu efficace.

La discipline budgétaire globale

La réalisation des dépenses, proche des montants initialement inscrits au budget (PI-1=B), malgré la régulation des dépenses résultant notamment des difficultés de mobilisation des recettes domestiques (PI-3=C), l’efficacité des contrôles internes des dépenses non salariales (PI-25=B+), les niveaux modérés de l’endettement public et du déficit budgétaire, le réalisme des perspectives macro-économiques et macro-budgétaires de moyen terme (PI-14=B), la fiabilité des prévisions de l’affectation des ressources en cours d’exercice (PI-21=B+) et la faiblesse des arriérés de dépenses (PI-22 = A), permettent d’assurer une bonne discipline budgétaire globale.

Certains indicateurs amoindrissent le renforcement de la discipline budgétaire. Il s’agit notamment de l’importance des réallocations entre les ministères au cours de l’exécution budgétaire (PI-2=D+), du montant significatif des opérations non rapportées de l’administration centrale (PI-6=D), de l'absence d’informations sur les risques budgétaires (PI-10 = D+), des insuffisances de gestion des investissements publics (PI-11=C+) et des actifs publics (PI-12=D+). Par ailleurs, la limitation de la stratégie budgétaire est limitée (PI-15=C+), les perspectives aux critères de convergence de l’UEMOA, de l’absence de document budgétaire sur l’analyse des écarts des estimations de 2019 contenues dans le budget et celles contenues dans la stratégie moyen terme de la budgétisation des dépenses manquent encore de fiabilité (PI-16=C+) et les (2018-2020), et de la production trop tardive des rapports de suivi d’exécution du budget en cours d’exercice sont (PI-28=C+).

L’allocation stratégique des ressources

L’allocation stratégique des ressources est renforcée par l’exhaustivité des informations contenues dans la documentation budgétaire (PI-5=B), la claire justification des procédures de transferts aux administrations infranationales (PI-7=B), le respect, par le gouvernement, suivi rigoureux du processus de préparation du budget et des délais de transmission du projet de budget au parlement (PI-17=B+), et, par le Parlement, celui des procédures lors de son examen (PI-18=B+).

Cependant, la rigueur des dispositifs d’allocation stratégique des ressources au niveau global fait défaut au niveau sectoriel, notamment à cause de l’importance des opérations non rapportées dans les états financiers (PI-6=D), d’une classification économique des dépenses insuffisamment détaillée (PI-4=C) et de l’établissement de plafonds pluriannuels de dépenses qui restent estimatifs jusqu’à leur adoption en conseil des ministres avant la transmission du budget au Parlement (PI-16=C+). Il s’ensuit que le législateur peut difficilement apprécier les grands choix stratégiques d’emploi des recettes publiques au niveau de la programmation budgétaire triennale et ne permet pas de prendre en compte tous les facteurs qui conditionnent la pertinence des décisions d’investissement.

L’utilisation efficace des ressources à des fins de prestation de services

Le pilotage des services publics bénéficie de l’aptitude du système de gestion des finances publiques à assurer l’efficacité des contrôles internes des dépenses non salariales et de la gestion de la passation des marchés publics. Il bénéficie également d’une bonne prévisibilité de l’affectation des ressources en cours d’exercice et d’un mécanisme approprié de transferts aux administrations basé sur les transferts de compétences aux entités infranationales, même si la transparence de ce mécanisme n’apparaît pas évidente de prime abord.

La faiblesse des audits pour vérifier l’efficacité du système de contrôle des états de paie (PI-23=D+),+), l’importance du montant des arriérés de recettes (PI-19=D+) et le rapprochement tardif de la comptabilisation des recettes (PI-20=D+) conduisant à la lenteur de production des rapports financiers annuels (PI-29=D+),+), la faible évolution des procédures d’audit interne (PI-26=D+) qui ne s’appuient pas encore sur les bonnes pratiques internationales basées sur les risques, et l’importance des comptes d’attente non apurés en fin d’année (PI-27=D+),+), conduisent à rendre moins efficace l’utilisation des ressources à des fins de prestation de services.

Enfin le système de remontée des informations sur les ressources directes reçues par les services de première ligne de l’éducation nationale et la santé (PI-8=D), l’accès du public aux principales informations budgétaires (PI-9=D), le suivi de l’exécution du budget par la Section des Comptes de la Cour Suprême (PI- 30=D), et l’examen des rapports qu’elle produit par l’Assemblée nationale (PI31=D) sont très insuffisants et contribuent à réduire l’efficacité de l’utilisation des ressources publiques à des fins de prestation de services.

Les principales évolutions depuis la précédente évaluation

Globalement, la performance de la gestion des finances publiques, portant sur les exercices 2016, 2017 et 2018 est restée à un niveau basique et a peu évolué par rapport à l’évaluation 2018 portant sur les exercices 2013, 2014 et 2015.

Sur la base des 31 indicateurs de la méthodologie PEFA 2016, aucun indicateur n’a obtenu le meilleur score, comme cela avait été le cas pour 2018. En revanche, 15 indicateurs ont reçu la note D ou D+, tandis que cela avait été le cas pour seulement 14 indicateurs pour l’évaluation de 2018.

Il ressort également de cette évaluation que 9 indicateurs ont enregistré une progression par rapport à l’évaluation précédente, 4 indicateurs ont présenté une régression et 18 indicateurs n’ont pas connu d’évolution.

D’une manière détaillée, les dépenses réelles totales ont été plus proches des prévisions initiales (PI-1 : D -> B), de même que la gestion de la passation des marchés publics (PI-24 : C+ -> B+) et la gestion de la dette qui se sont encore améliorés. Le budget a été mieux préparé, notamment suite à l’adoption, à bonne date, du Document de Programmation Budgétaire et Economique Pluriannuelle (DPBEP) 2019-2021, les arriérés de dépenses se sont réduits entre 2016 et 20181, et les prévisions des ressources en cours d’exercice ont été actualisées tous les mois.

La gestion des recettes s’est également améliorée (PI-19 : D -> D+) durant la période sous revue, malgré un taux d’exécution en deçà des prévisions pour les évaluations 2018 et 2019 (PI-3=C), notamment grâce à la refonte du site web de la DGI, qui prend désormais en charge l’exécution de services en ligne, donne plus de clarté aux contribuables sur leurs droits et leurs obligations (PI-19.1 : C -> B). La transparence s’est également améliorée au niveau de la gestion des investissements publics avec la publication de critères standards de sélection sur le site de la DNPD (PI-11.2 : B -> A).

En revanche, les indicateurs suivants ont connu une détérioration de leur performance : les ministères sectoriels élaborent annuellement des projets annuels de performance (PAP), mais les services délivrés et les résultats prévus n’y apparaissent pas clairement (PI-8.2 : B -> C), aucun audit n’a été effectué sur le fichier de la solde au cours des trois derniers exercices (PI-23.4 : C -> D). Les rapports annuels de performance ne permettent pas de rendre clairement compte des résultats des PAP (PI-8.2 : B ->D). Enfin, la section des Comptes a transmis ses rapports au Parlement plus de 9 mois après la date de réception des états financiers de l’administration centrale (PI-30 : D+ -> D).

Au niveau des principaux objectifs budgétaires, la situation s’est améliorée au niveau de la discipline budgétaire, principalement parce les dépenses budgétaires globales (PI-1) ont été plus proches des montants initialement votés par le Parlement. Dans une moindre mesure, la réduction des arriérés de dépenses (PI-22) - sauf au cours de la dernière année – et l’amélioration de la perspective à moyen terme de la budgétisation des dépenses (PI-16) ont également contribué à améliorer la discipline budgétaire.

En revanche, l’allocation stratégique des ressources ne s’est pas améliorée par rapport à l’évaluation précédente et les services ne sont pas rendus de manière plus efficace. L’amélioration de la gestion de la passation des marchés publics (PI-24) est amoindrie par la détérioration des indicateurs portant sur la production des rapports budgétaires (PI-28) et le manque d’efficacité de l’audit de la SC-CS (qui ne résulte cependant pas d’une détérioration de la situation, mais d’une différence d’appréciation par rapport à l’évaluation précédente).

Les réformes en cours

Le Mali s'est engagé dans un processus de réformes de la gestion des finances publiques qui s'inscrit dans le cadre des initiatives communautaires qui visent à harmoniser, au sein de l’UEMOA, la réglementation et la pratique en matière de gestion des finances publiques.

Dans cette optique, le Plan de Réforme de la Gestion des Finances Publiques au Mali (PREM) 2017-2021 développé sur la base de 5 axes stratégiques correspond à la mise en oeuvre de la 3ème génération de ce type de réformes. En 2018, la mise en oeuvre des activités du PREM s’est déroulée dans un contexte budgétaire marqué par l’exécution du budget d’Etat en mode budget-programmes. Elle s’est également focalisée sur la mobilisation des recettes fiscales, afin d’atteindre le critère de convergence fixé par l’UEMOA (20% de taux de pression fiscale à l’horizon 2019) et la création d’un Fonds pour le Développement Durable (FDD).