Morocco 2016

Processus d’évaluation selon le nouveau cadre d’évaluation PEFA

L'objet de cette évaluation est de mesurer la performance du système de gestion des finances publiques du Maroc entre 2012 et 2016 selon le nouveau cadre PEFA 2016.

L'évaluation au Maroc a également été conduite dans un premier temps selon la méthodologie test 2015, ce qui a permis d'informer le processus de développement de la méthodologie définitive 2016 de cette expérience au Maroc.

De plus, le rapport évalue également l'évolution de la performance depuis la dernière évaluation PEFA, réalisée en 2009 et portant sur les exercices 2006 à 2008. Cette évaluation couvre les sept piliers de la gestion des finances publiques et mesure l'impact de cette gestion sur les trois principaux objectifs financiers et budgétaires suivants : (i) la discipline budgétaire globale, (ii) l'allocation stratégique des ressources et (iii) l'utilisation efficace des ressources à des fins de prestation de services publics. Cependant, cette évaluation n'analyse pas, de manière exhaustive, la gouvernance et la performance des services publics, qui doivent être analysées en conjonction avec d'autres indicateurs de gouvernance et les résultats d'autres travaux analytiques sur ces sujets.

La Banque mondiale, la Banque africaine de développement et l'Union européenne ont assuré la responsabilité de l'évaluation. Une mission d'expertise, composée de cinq experts mobilisés par chacun des trois partenaires internationaux, a conduit le travail en étroite et permanente collaboration, dans le cadre d'un groupe de travail, avec les représentants de l'ensemble des institutions et administrations impliquées, sous la coordination de la Direction du Budget (DB) du Ministère de l'Economie et des Finances (MEF).

Un groupe de référence, regroupant, à la fois, les représentants des principales administrations et institutions nationales, ainsi que les représentants des partenaires internationaux, a examiné les versions successives des analyses. Le dispositif «PEFA check» a été appliqué aux différentes étapes du processus.

L'évaluation s'est déroulée entre avril 2015 et mai 2016 et a bénéficié des informations et observations recueillies au cours de 4 missions sur place. Les versions successives du présent rapport ont été examinées par toutes les parties. Après prise en compte des modifications liées à l'évolution de la méthodologie PEFA et les dernières observations du secrétariat PEFA, le projet de rapport final a été présenté aux autorités marocaines dans le cadre d'un atelier de restitution le 27 mai 2016.

La mission tient à remercier l'ensemble des représentants des administrations et des institutions rencontrées, dans le cadre de ce travail, pour leur collaboration et la qualité du dialogue. Le champ de l'évaluation est l'administration centrale et ses services déconcentrés, auxquels s'ajoutent, seulement pour les quelques indicateurs qui l'exigent, les Etablissements Publics, les Entreprises Publiques et les Collectivités Territoriales. Elle couvre la période 2012 à 2014, mais concerne également pour certains indicateurs les pratiques en cours en 2015 et 2016.

La présente évaluation porte sur les trois exercices clôturés, à savoir 2012, 2013 et 2014. Pour la notation de certains indicateurs et conformément à la méthodologie du cadre PEFA, les données de l'exercice 2015 ont été prises en compte.

Résultats de l’évaluation

Il ressort de cette évaluation que la performance des systèmes de GFP est très favorable à la réalisation de l'objectif de discipline budgétaire, mais qu'elle est moins favorable à l'atteinte des objectifs d'allocation stratégique des ressources et de prestations de services publics de qualité.

Les principales conditions relevant de la discipline budgétaire et financière sont en effet réunies, comme en témoignent la fiabilité du budget et la réalisation des objectifs de stabilité qui lui sont fixés. En dépit d'un certain retard dans la réalisation des investissements prévus, qui tendnéanmoins à se résorber, la programmation du budget est fiable et sa mise en œuvre bénéficie d'un système informatique performant et d'un contrôle interne robuste. Dans un environnement institutionnel caractérisé par une décentralisation de l'action publique et un recours important aux opérateurs externes, la supervision financière des collectivités territoriales, des établissements publics et des entreprises publiques par l'Etat central apporte une contribution essentielle à la stabilité financière de l'Etat. La passation des marchés publics est soumise au principe de mise en concurrence des candidats. La Cour des Comptes, dont l'indépendance est bien garantie, même si les règles de nomination et de remplacement du Premier Président ne sont pas définies dans la loi, assure un contrôle externe efficace et reconnu. Des aspects de la GFP tels que la dimension pluriannuelle du pilotage budgétaire, la supervision financière et le contrôle interne et externe par les risques, ainsi que la collecte des recettes et les états financiers annuels, sont encore perfectibles et font l'objet de programmes de réforme.

L'objectif d'une allocation plus stratégique des ressources publiques reste une priorité pour le Gouvernement. Cet objectif est central au programme de réforme, en cours de mise en œuvre. Les ministères se sont dotés de stratégies sectorielles, mais ces dernières sont parfois insuffisamment chiffrées en adéquation avec les budgets. La discipline budgétaire est assurée et devrait être propice à une gestion stratégique de qualité des ressources budgétaires. La trésorerie est maîtrisée et les responsables des départements ministériels ont toute la latitude nécessaire pour gérer de façon optimale en cours d'année les crédits qui sont mis à leur disposition dès le début de l'exercice. Mais faute de programmation budgétaire pluriannuelle (PBT), en cours de mise en place, les priorités stratégiques ne sont pas budgétisées de façon suffisamment rigoureuse. Même l'outil de base qu'est la nomenclature budgétaire est encore insuffisamment adapté à la gestion stratégique. La nomenclature programmatique devrait entrer en vigueur dans le cadre du Projet de Loi de Finances 2018. Les grands projets d'investissement, qui font pourtant l'objet d'études préalables rigoureuses de faisabilité et de rentabilité, ne sont pas sélectionnés selon une procédure centralisée, sur base de critères connus de tous. Enfin, l'évaluation des politiques publiques et des programmes reste limitée et une politique de suivi et d'évaluation de la performance, prévue par la LOF est en cours de développement.

Le système actuel de gestion des finances publiques ne contribue que modérément à l'amélioration de la qualité des services publics. C'est un des objectifs de la loi organique des finances qui introduit une approche axée sur la performance et prévoit des objectifs et indicateurs sur la qualité des services. De même, la refonte du système de gouvernance et de contrôle des entreprises et établissements publics vise à améliorer leur performance et la qualité des services publics. Dans un cadre institutionnel où l'action opérationnelle de l'Etat est confiée, pour une très large part, à des opérateurs externes, quelle que soit leur forme juridique, la tutelle stratégique et le contrôle pratique, que doit exercer l'Etat sur la fourniture par ces opérateurs des services publics de base, doivent être étroits. C'est encore insuffisamment le cas au Maroc, ou la déclinaison opérationnelle de la nouvelle démarche de gestion programmatique et de performance, des outils de reporting et de dialogue de gestion adéquats, tels que des contrats de performance, est en cours de déploiement. La supervision des établissements et entreprises publiques est de qualité et gagnerait à être plus intégrée et harmonisée avec la LOF afin de permettre à l'administration centrale un meilleur suivi des ressources et de la performance des prestataires de services publics, y compris du point de vue de l'efficience et de la qualité des services. La responsabilité programmatique n'est pas encore institutionnalisée. La comptabilité analytique et les rapports sur la performance ne sont pas encore déclinés aux niveaux déconcentrés et décentralisés de l'action publique, en matière de fourniture de services publics, en dépit d'un système informatique qui le permettrait. Cette situation est confirmée par les différentes évaluations nationales et internationales des services publics, particulièrement dans les domaines sociaux.

Une tendance positive dans l’évolution de la performance des systèmes de gestion des nances publiques depuis 2009.

Une comparaison entre cette évaluation et la dernière réalisée en 2009, selon le même référentiel du cadre PEFA 2005, fait apparaître une évolution globalement favorable, mais inégale à travers les différents domaines de la gestion. D'un point de vue quantitatif, le nombre d'indicateurs notés A ou B a progressé de 17% entre 2009 et 2016. Cette évolution ne prend pas encore en compte la réforme de la loi organique des finances, dont la mise en œuvre, progressive, s'étalera sur cinq ans, à partir de 2016. Des améliorations ont été notées dans les domaines de la crédibilité budgétaire, de la transparence, ainsi que des contrôles externes. Les domaines liés à la budgétisation basée sur les politiques publiques, à l'exécution, au contrôle des dépenses et à la comptabilité n'ont pas suffisamment évolué.

Sauf en matière d'arriérés, pourtant déjà considérés comme un point de faiblesse en 2008, la crédibilité du budget s'est améliorée. Dans le domaine de l'extension du champ de couverture budgétaire et de la transparence de ses opérations, certaines insuffisances n'ont pas été réduites, notamment la qualité de l'information relative à la prestation des services publics, aux projets financés sur fonds extérieurs, ainsi que la transparence des relations entre l'Etat et les communes.

La préparation annuelle du budget demeure de bonne qualité. La situation de 2009 était plutôt positive dans le domaine de l'exécution budgétaire. Les faiblesses qui existaient n'ont, cependant, pas été en général comblées, notamment dans le domaine de la gestion des arriérés d'impôts, et de la fréquence des modifications des dotations budgétaires en cours d'année. Des progrès majeurs ont été réalisés grâce au déploiement du système de gestion intégrée/informatisée de la dépense (GID), notamment dans le système de contrôle interne, mais le système de notation PEFA ne permet pas de les saisir. La vérification interne par les corps de contrôle tarde à évoluer vers un audit interne basé sur les normes internationales.

La mise en place de GID a amélioré les processus de comptabilisation des opérations et la production des rapports, mais pas autant qu'il pouvait l'être espéré : le suivi de l'exécution s'est nettement amélioré, mais la production des états annuels reste tardive par rapport aux normes internationales. L'objectif d'amélioration du reporting fixé par les réformes engagées après le PEFA de 2009 n'a été que partiellement atteint.

En matière de contrôle externe, la comparabilité des deux évaluations 2009 et 2016 n'est pas aisée en raison de la disponibilité d'informations différentes aux deux dates. Toutefois, deux améliorations importantes peuvent être soulignées. D'une part, les relations entre la Cour des Comptes et le Parlement se sont développées et d'autre part, la Cour des Comptes, comme le Parlement, s'attache désormais à faire des recommandations et à suivre leur application par le gouvernement. Toutefois, dans le cadre du PEFA 2016, l'absence d'audit des états financiers par la Cour des Comptes rend difficile à évaluer la performance du pilier « Supervision et audit externes ».

Le programme actuel de réforme de la gestion des finances publiques est dominé par la mise en œuvre, à partir du 1er janvier 2016, de la nouvelle loi organique relative à la Loi de Finances, promulguée en juin 2015. Elle prévoit le déploiement de la gestion axée sur la performance, l'accroissement de la transparence et le développement du rôle du Parlement, à la fois dans la préparation de la Loi de Finances et le contrôle de son exécution par le gouvernement, dans toutes ses dimensions. Une grande partie des faiblesses actuelles de la GFP - notamment l'absence de la pluri annualité, la faiblesse de la dimension stratégique de la programmation budgétaire et de l'action de l'Etat, l'insuffisance de l'évaluation des politiques publiques - devraient trouver une solution à terme dans le cadre de cette profonde et large réforme.

Plus spécifiquement, ¡I est aussi prévu que l'usage des CST soit rationalisé et davantage encadré. Les inspections internes vont être renforcées et leur activité développée vers l'audit interne. L'application GID a été étendue à toutes les Collectivités territoriales en 2014 et le système GIR est en cours de finalisation.

Toutes ces grandes réformes appelleront à des appuis plus adaptés aux départements sectoriels, notamment en matière de formation.